Interview d'Isabelle Guso - Addendum

Depuis quelques temps, Isabelle Guso, l'auteure du très remarqué Présumé coupable, était sortie de nos écrans radars. Que faisait-elle ? Où était-elle ? Que lui était-il arrivé ? Autant de questions que vous deviez bien sûr vous poser (en tout cas, moi, je me les posais). Pas de panique ! (oui, j'ai lu récemment H2G2, du regrétté Douglas Adams, et ça a tendance à déteindre). Isabelle Guso en personne a eu la gentillesse de répondre à quelques-une de mes questions :

A.C. de Haenne : Isabelle, depuis deux ans, tu as pratiquement disparu des réseaux sociaux, forums et autres blogs. Peux-tu nous dire ce qui s’est passé ?

la nouvelle Isabelle Guso

Isabelle Guso : Trois enfants, un diagnostic d'autisme, un déménagement 800 km plus au nord, des grippes et pneumonies conséquentes (euh... une seule pneumonie, quand même, n'exagérons pas) un divorce, une reprise d'études, une reprise du sport (objectif : ne pas exploser en plein vol sans me mettre à la drogue)... Beaucoup de vies à faire rentrer dans une seule vie. Celle d'auteur/bloggueuse/forumeuse ne rentre plus pour l'instant, ou seulement par à-coups.

A.C. : Mais tu es là et c'est ça qui compte ! As-tu encore des projets en rapport avec l’écriture et l’édition ? Aura-t-on la chance de pouvoir te lire un jour prochain ?

I.G. : Oui et oui. Donc tout va bien:-)

Plus sérieusement. Oui, des projets. Plein. Du réel. Trois romans commencés, à écrire, un besoin vital. En stand by.

De l'Imaginaire aussi. Je croyais la source tarie. Mais les idées viennent encore, elles sèment des petites graines sur mon PC en attente de germer un jour. Dans ce domaine-là, davantage de nouvelles que de romans (c'était le contraire au début). Envie d'être plus incisive, d'atteindre un objectif, réussir à découper l'idée au scalpel et la faire ressortir, presque nue.

De toute façon, tout change, tout le temps. Ma plume change aussi, beaucoup. Je le sens quand je corrige des textes comme je l'ai fait récemment. J'ose croire qu'elle s'améliore même si j'écris moins. Je m'assume plus, j'apprends la concision (si si!). Et je vis. La plume se nourrit de ça, elle attend, presque en embuscade.

J'ai envie aussi de voir aboutir ce que j'avais produit avant. J'espère pouvoir me relire, affûter ce que j'avais écrit en un temps où j'avais davantage besoin de compromis, de tenter de plaire à tout le monde. Peut-être que ça ne marchera pas. On ne peut pas toujours revenir en arrière. Dans tous les cas, ce n'est pas grave, il y a beaucoup à faire devant aussi.

illustration de Zariel

Pour répondre à ta deuxième question, oui, on pourra me lire prochainement (à savoir si c'est une chance....). J'ai corrigé deux textes récemment. L'un devrait paraître bientôt dans l'anthologie Virus chez Griffe d'Encre. Pour l'autre, les corrections commencent. C'est un texte sur les mythes scandinaves à paraître chez Argemmios. Dans les deux cas, c'est une expérience un peu étrange pour moi, comme si l'Isabelle d'aujourd'hui rencontrait celle d'hier. Ces textes datent « d'avant » et je n'ai plus la liberté de les changer complètement . Alors c'est un peu comme si je faisais de la beta lecture pour une amie, en essayant d'améliorer ce qu'elle a écrit, tout en respectant « son » style qui n'est plus le mien. C'est un peu perturbant.

A.C. : Qu’en est-il de ta trilogie prévue chez Argemmios ?

I.G. : Une histoire un peu compliquée de mauvais timing. Natahlie Dau, la directrice, voulait vraiment sortir ce texte. Mais à ce moment-là, elle n'avait pas de place sur son calendrier. Quand les corrections ont enfin pu commencer, c'est moi qui ne pouvais plus. Deux millions de signes, ça ne se corrige pas comme ça. C'est une histoire pleine d'intrigues, assez compliquée, où tout doit se relier à la fin sans fausse note. Il aurait fallu que j'ai le temps de tout relire, de me remettre dedans pour ne pas créer d'incohérences en cherchant à améliorer. Je ne pouvais pas à ce moment-là de ma vie.

Cela dit, cette trilogie est encore plus forte aujourd'hui pour moi. Je me retrouve davantage dans l'héroïne. Je crois qu'elle incarnait le fantasme de ce que j'aurais voulu être face aux épreuves de la vie. Finalement, au moment de faire face à certains combats, je ne me suis pas trouvée si éloignée d'elle. Mêmes forces, mêmes failles aussi (le côté experte du katana en moins, quand même... Mais je m'en tire à peu près avec une paire de baskets). Je sais que je reprendrai ce texte. J'ai besoin de le redécouper, le dénuder un peu, inciser le superflu pour aller au cœur de ce qui me touche.

l'ancienne isa

A.C. : As-tu un message que tu voudrais faire passer (sans rapport obligatoirement avec l’écriture) aux lecteurs de ce blog ?

I.G. : « Faites que le rêve dévore votre vie, afin que la vie ne dévore pas votre rêve ». Non, ça a déjà été dit. Alors je dirai juste : Saint-Ex avait raison (Saint ex a toujours raison). Croyez-y. Croyez-y, bon sang ! L'écriture, les enfants, la vie, le handicap, la maladie... Tout est combat, tout peut donc devenir victoire (et défaite aussi, mais un échec ce n'est jamais que quelque chose qu'on n'a pas accompli cette fois-ci et qu'il faudra réussir demain). Le mot impossible n'existe pas. Il y a des choses qu'on n'arrivera pas à faire parce qu'on sera mort avant, c'est tout. Tant pis, d'ici là, on y aura cru.

Et moi, je crois que j'ai encore des livres à écrire. Tant que je ne serai pas morte, je continuerai de croire qu'ils vont exister.

Merci de m'avoir invitée ici. Ça m'a touchée. Beaucoup.

Voilà, c'est tout (?). Un grand merci à Isabelle que j'ai été vraiment ravi de retrouver et j'espère de tout cœur que pour vous c'était aussi le cas.

A.C. de Haenne