Unknown pleasures. Joy Division vue de l’intérieur, de Peter Hook.
Fin des années 1970, inspirés par l'énergie du punk, Peter Hook et
Bernard Sumner, à qui se sont joints Ian Curtis, chanteur-compositeur et
Stephen Morris à la batterie, démarrent un groupe qui influence encore
aujourd'hui la musique pop. Avec quelques instruments rassemblés à la va-vite
et un vieux van, voilà les quatre jeunes gars de Manchester et de Salford
partis écumer les pubs et les clubs d'Angleterre. Le premier concert sous le nom
de Joy Division est catastrophique. Ce n'est pas grave, ils continuent. En
1980, ils sortent deux albums et sont sur le point de tourner en Amérique. Tout
s'enchaîne. Joy Division a métamorphosé le visage de la musique. Parrains de la
scène alternative actuelle, les membres du groupe ont revitalisé le rock à
l'ère du post-punk, élaborant un son nouveau, sombre, hypnotique et intense,
qui influencera The Cure, Morrissey, Radiohead et de nombreux autres.
Je me souviens encore, espèce
d’ersatz de Robert Smith qui bricolait avec sa garde robe pour en tirer les fripes les plus délavées, émaillées, couleurs sombres – déjà un peu punk quand j’y repense. Je devais avoir quinze ans à tout péter, vivant encore au domicile parental et égrenant les jours de lycée. Rien de bien palpitant en soi. Sauf que, à côté de cette routine, il y avait un disquaire indépendant comme on en fait plus, spécialisé dans le vinyle (enfin, il est encore là. Ty Blurt, même si tu me lis pas). Alors,
plutôt que passer dans ces boutiques de fringues et de godasses hors de prix,
je faisais mon pèlerinage apériodique, voir ce que je pouvais dénicher dans
cette pièce exiguë. Eh oui, toi le petit émo, sache qu’il est possible de ne
pas mettre toutes ses économies dans ce que tu as sur le dos et aux pieds, pour
les injecter en musique et concerts… Tout ça pour dire qu’un jour, le M’sieur
Blurt me braille – pas qu’il soit sourd, la musique était forte… mais les deux
sont-ils dissociés ? ‑ « J’ai un truc de goth pour toi ! ».
Et me voilà avec le vinyle de Closer de
Joy Division entre les mains. Eh bien, quelle claque ! Closer, c’est le second album de Joy Division, paru de façon posthume. Le
son est très clinique, la voix profonde, les textes désespérément beaux. Bref,
il a un pouvoir hypnotique certain. Unknown
pleasures, qui donne son nom à cet ouvrage, est le premier. Beaucoup plus
punk dans l’approche celui-là. Il n’en est pas moins claustro’.
Point de vue historique, Joy
Division est l’un de ces nombreux groupes qui bouillonnaient en Angleterre, et
en l’occurrence dans la région en noir et blanc de Manchester dans les années
1970. Entre petits boulots minables, grosses rasades, psychotropes divers, ces
jeunes gens n’avaient pas besoin de découvrir le punk pour en être. Ian Curtis,
c’était plutôt David Bowie, Lou Reed, Siouxsie… Il n’empêche que prendre un
concert des Sex Pistols en pleine
tronche a de quoi marquer, « tellement mauvais qu’on s’est dit qu’on
pouvait le faire nous aussi » dira plus tard Peter Hook – le bassiste de
Joy Division puis New Order et auteur
de cette biographie.
Alors, que trouve-t-on dans cette
biographie ? Au final, au niveau du contenu, c’est assez convenu, a fortiori si on considère que l’auteur
n’est autre qu’un des membres fondateurs. Nous avons donc le droit à notre lot
d’anecdotes, sur la vie du groupe, sur leurs galères tant pour joindre les deux
bouts que pour composer/se faire/enregistrer/diffuser/jouer live. Ce qui fait
la force de ce témoignage est bien le ton et les partis pris de Peter Hook.
D’abord, il nous donne à voir ce que pouvait être le quotidien mancunien à
cette époque. Et autant dire que nous sommes loin des paillettes… enfin, si,
mais vous me comprenez. Il nous donne aussi à voir comment ces groupes sans le
sou appréhendaient la musique alors : si vous n’avez que deux heures pour
enregistrer vos pistes, eh bien autant y aller à fond direct, et ne pas
s’attarder sur des conneries qui, au final, ne font pas avancer le bazar voire
le dénature. C’est ce que Hooky reprochera ensuite à New Order, ce manque de spontanéité. Joy Division était un groupe constitué de punk mais qui composaient
une musique d’esthètes. Enfin, Peter Hook en profite aussi pour régler ses
comptes, avec Bernard Sumner notamment, guitariste de Joy Division puis de New
Order.
Il est à peu près certain que
pour avoir envie de se plonger dans cet ouvrage, il est mieux d’être déjà un
peu familiarisé avec le groupe, tout du moins sa musique. Peter Hook préconise
d’écouter l’album éponyme en même temps. Ce n’est pas idiot tant des petits
détails apparaissent à mesure qu’il raconte des anecdotes notamment sur les
conditions d’enregistrement et de répétition. A noté l’excellent film d’Anton
Corbijn, Control, centré sur la vie d’Ian Curtis.
IV
Les Murmures
A noter une chronique de Gérard et Mao Abdaloff sur le même sujet, dans la salle 101 !
Et une autre de Gromovar : http://www.quoideneufsurmapile.com/2013/03/this-is-crisis-i-knew-had-to-come.html
Et une autre de Gromovar : http://www.quoideneufsurmapile.com/2013/03/this-is-crisis-i-knew-had-to-come.html
Livre très plaisant imho. http://www.quoideneufsurmapile.com/2013/03/this-is-crisis-i-knew-had-to-come.html
RépondreSupprimerCe commentaire a été supprimé par l'auteur.
RépondreSupprimer