Viens là que je te tue ma belle, de Boris Bergmann
Clac, clac, clac, clac... J'adore écouter le bruit du talon de mes
boots sur le marbre blanc de mon hall d'entrée. Quand je passe devant le
miroir, je croise mon doux reflet, glacé dans l'immensité argentée, qui se
répète... Qui se répète... Jusqu'à l'infini. Je reste quelques secondes à me
regarder. Puis, quand tout est parfait, quand mes cheveux brillent à la lueur
des derniers rayons du soleil couchant, quand le khôl noir sous mes yeux fait
disparaître les traces de cernes des nuits dernières... Et seulement à ce
moment... Je commence à m'admirer. Je dois être parfait.
Pour moi, Boris Bergman était l’un
des paroliers d’Alain Bashung, auteur de certains de ses tubes. Et puis, le web aidant, je me rends compte qu’il ne s’agit pas du tout du même gars ! Le
n en plus. Subtil. Bon, tant pis,
maintenant qu’il est entre mes mains…
Au
détour d’une bouquinerie, je suis tombé sur ce roman, le premier essai de
l’auteur. Un titre qui interpelle, des guitares sur la couverture, pas bien
volumineux et un euro symbolique. C’était l’occasion.
Viens là que je te tue ma belle, c’est l’histoire d’un adolescent
de bonne famille, habitant à Paris, qui s’emmerde. Jusqu’au jour où il se
vautre dans le sexe, l’alcool et le rock&roll. C’est l’histoire d’un p’tit
gars qui se prend pour le roi mais qui se fait souvent conspuer quand même,
même s’il ne le perçoit pas nécessairement.
Tout commence par un cadeau
empoisonné. C’est l’histoire du serpent qui tend la pomme à Eve. Ici, le
serpent est un des animateurs d’un genre de colo’, la pomme est un numéro de Mojo. Et plus rien ne sera plus comme
avant. Au fur et à mesure de sa lecture, notre « héros » découvre
Lemmy, découvre la pochette psychédélique des 13th floor elevator, les pantalons slims, les trench, les godasses
en cuir. Mais, à ce stade, il est encore mal dégrossi. Il n’a pas encore goutté
aux toxines ni aux bandes. Qu’à cela ne tienne ! Ce n’est qu’une question
de temps, de quelques pages en fait. Le propos du roman est ainsi de suivre l’ascension,
ou plutôt la descente aux enfers, de l’auto-baptisé Aldo (ouais… parce qu’Aldo
a la classe. Pas sûr que ce soit
nécessaire d’aller plus loin) : premières fripes, premiers concerts,
premières cuites, premières filles, premières bastons… Et il dit « que ce
fut bon ! ». Oui, la trame est simplissime et fait davantage office
de prétexte qu’autre chose.
Au final, Viens là… est un roman d’apprentissage écrit par un adolescent. Et
cela se sent à la lecture. Boris Bergmann s’amuse, fantasme sans doute un peu
aussi. Le style est bien percutant. Les scènes décrites sont sans doute
exagérées, à mi chemin entre un passé idéalisé et des préoccupations de son âge.
Ecrit sous forme de journal intime, nous n’avons que le point de vue du
protagoniste principal. Forcément, son interprétation des événements ainsi que
l’image qu’il a de lui sont très égocentrées, quasiment narcissique. Un
décalage apparaît alors entre la teneur du discours et le regard que le
lectorat, souvent plus âgé que l’auteur à mon avis, porte sur l’intrigue. Enfin,
pour l’intrigue, on ne sait pas où elle va. En tout cas, Aldo y fonce la tête
la première. Viens là… est très loin
d’être la lecture du siècle. Mais c’est parfait pour le métro, par exemple.
III
Les Murmures.
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