Hotel, présenté par Boichi


Avec Hotel de Boichi, découvrez cinq récits voguant entre science-fiction et fantastique, entre narration dramatique et humour. Plongez vous dans la disparition poignante de l’humanité, vivez une histoire d’amour surprenante par delà les années ou découvrez les miracles d’un biologiste rêveur…

S’il y avait un palmarès des pays les plus obnubilés par la fin du monde ou les visions d’apocalypses, le Japon y figurerait en bonne place. Il faut leur reconnaître que son histoire ressemble à une succession de piqures de rappel sur ce que l’homme peut avoir de destructeur. Ceci dit, quand Boichi s’attaque à cette thématique au travers de cinq « nouvelles » (si ce format existe pour le manga), le ton n’est pas forcément alarmiste. Certes, le thème n’est pas joyeux. Mais la fin du monde est aussi la fin d’un monde, dans ses contours et dans la manière de le regarder. Aussi, Boichi fait-il le grand écart entre scènes particulièrement émouvantes et fortes, et d’autres pour le moins décalées. Le tout donne un recueil atypique et intéressant bien qu’inégal.

Hotel s’ouvre sur un récit de pure science-fiction. L’humanité telle que nous la connaissons a fait ce que nous connaissons : elle a détruit, progressivement, son environnement. Les eaux montent, les vents se lèvent. Pour conserver une trace de son paysage, des scientifiques mettent au point une tour intelligente. Capable de s’autogérer, l’ordinateur parviendra à tenir contre les éléments. Non sans peine, il semble que la créature réussisse là où les créateurs ont échoués, à savoir s’adapter à son environnement plutôt que contraindre ce dernier.
Cette fable écologique fait place à une histoire d’amour autant éphémère que terrible. Un couple, à la différence d’âge certaine, doit faire face à la maladie. Ici, le monde persiste. Mais le monde de cet homme s’écroule bel et bien, ce qui est peut être encore plus tragique.
Et si la fin du monde était la disparition du thon rouge ? Dans un archipel consommateur de sushi, ce serait terrible. Mais ce qui devait arriver arriva : un jour, un père fait un cadeau de choix à son rejeton. Il lui laisse manger le dernier sashimi de thon rouge. Traumatisé, le jeune garçon se fait scientifique biologiste. Bien décidé à recréer le thon rouge afin de perpétrer ce plat exquis, il verra qu’il n’est pas si simple de synthétiser des créatures. Dans une société où l’homme se croit tout puissant, le ton enjoué du récit tranche avec le sujet sous-jacent.
Nous touchons au fantastique dans le quatrième récit, relatant la relation de ce couple, là encore atypique, connaissant une fin des plus tragiques. Enfin, Hotel s’achève avec un dernier récit fantastique, voire fantasy, tout en couleur. Si je ne m’attarde pas sur ces deux derniers volets du recueil, c’est bien que je suis bien moins convaincu que pour les trois premiers.
Par ailleurs, les différents récits sont entrecoupés par des interludes de deux ou trois pages, dans un registre plutôt décalé et rafraichissant.

Hotel est une lecture agréable, bien qu’inégale. Certaines nouvelles sortent clairement du lot. Les trois premières sont de fort bonne facture, chacune dans un style différent. Les autres me touchent moins. Ceci dit, Boichi réussit aussi le tour de force de proposer un recueil brassant les différents types de manga sans pour autant s’y arrêter ou se vautrer dans la caricature. Et, ça, ce n’était pas gagné.

Note : III

Les Murmures.

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