Fahrenheit 451, par Ray Bradbury
Guy Montag est un pompier. Mais dans cette société où les livres sont interdits parce que considérés comme corrompant l'âme, leur rôle n'est plus d'éteindre les flammes mais bien au contraire de les répandre. Leur cible principale : les livres. Alors, quand Montag rencontre la jeune Clarisse, qui lui fait partager son goût pour la lecture, il se rend compte de la vacuité de sa vie...
illustration : d'après photos © Masao Mukai & Syata Tokitsume |
Encore un classique que je rattrape ! Et quel classique !
Mais le problème avec la lecture des livres que l'on qualifie de "classique", c'est qu'on en attend parfois un peu trop. C'est peut-être le cas avec ce roman de Ray Bradbury, qui est ce qu'on appelle un fix up de trois longues nouvelles. Farhenheit 451 est sorti pour la première fois aux États-Unis en 1953, en plein maccartisme, une période noire pour la liberté d'expression dans ce grand pays. Et le Nazisme et ses autodafés publics ne sont pas si loin que cela... Car si les grandes oeuvres de science-fiction parlent avant tout du présent en plaçant l'intrigue dans un futur plus ou moins lointain, ce roman ne fait que cela. Ici, aucune date n'est précisée. Seuls quelques détails, comme des robots-limiers qui chassent les contrevenants à la loi interdisant les citoyens de posséder ou de lire des livres, accusés d'apporter de la culture au peuple et donc de les pervertir, nous montrent que l'histoire ne se situe pas dans les années 50. Car si Farhenheit pouvait dénoncer le maccartisme de façon détournée dans les années 50, il peut aussi parler au lecteur de notre décennie. Bien sûr, les livres ne sont pas interdits de nos jours, mais l'acculturation de masse est tout de même en route. Elle ne se fait pas par une loi qui interdit, elle se produit de façon bien plus insidieuse, en prenant des chemins détournés.
Si le fond demeure pertinent pour un lecteur de 2016, qu'en est-il de la forme ? Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle a quelque peu vieilli. Certes Ray Bradbury possède un style poétique, mais j'ai trouvé l'écriture un peu poussive. Jamais l'auteur n'aide le lecteur à trouver son personnage sympathique. Pourtant, Guy Montag est un rebelle à l'ordre établi. D'autant plus courageux qu'il faisait lui-même partie du bras armé du système répressif. Malgré sa prise de conscience (trop tardive ?), il demeure sans relief, sans vie presque. Et à l'instar d'un autre de ses grands livres (peut-être encore plus connu que celui-ci, Les Chroniques Martiennes), une guerre finit par éclater. Pourquoi ? Comment ? Entre qui et qui ? On ne sait rien de cela et on s'en fiche presque. Et je ne dirai rien de la résolution de ce Farhenheit 451, un peu trop capillotracté à mon goût personnel.
Si ma chronique est en demi-teinte, c'est bien parce qu'elle reflète ma lecture de ce "classique" que je n'hésiterais pourtant pas à conseiller, rien que pour se faire sa propre opinion. Voici quatre ans de cela, mon collègue Les Murmures s'était déjà fendu d'une chronique sur le présent blog.
A signaler que Fahrenheit 451 a fait l'objet d'une adaptation officielle en 1966, signée François Truffaut. Je ne l'ai jamais vue. Malheureusement, n'étant pas très fan de l'oeuvre du réalisateur français, je ne suis même pas sûr d'avoir envie de la voir un jour.
En 2004, Farhenheit 451 a reçu un retro-prix Hugo pour l'année 1954.
note : II
Fahrenheit 451 - Gallimard FolioSF - traduction de Jacques Chambon & Henri Robillot - 224 pages - F5 - D.L. : janvier 2008
Chronique réalisée sans avoir atteint la température d'ignition, mais peu s'en est fallu, dans le cadre d'un triple challenge, celui de Lhisbei d'abord (item #5) :
Et, last but not least, celui de Marie Juliet :
Etudié à la fac, dans un cours sur la dystopie (la vraie...). ;) Je suis d'accord avec tes critiques sur le style, ce n'est pas extraordinaire à lire - 1984 dans le même cours m'avait largement plus prise aux tripes - mais je sus ressortie plutôt contente de ma lecture, tout de même. Concernant la fin je trouve que ça correspond pas mal effectivement à Bradbury, j'avais lu les Chroniques martiennes et aussi un autre recueil de nouvelles si je me souviens bien, et il semble aimer assez les fins un poil tirées par les cheveux / les retournements de situations un peu exagérés. Parfois ça marche, parfois un peu moins. Ceci dit ça reste vieux, c'est peut-être à mettre en lien.
RépondreSupprimerHeureux de te voir (aussi) par ici !
SupprimerOui, 1984 a les mêmes défauts de style vieilli qui plombe le rythme de la lecture, mais tout comme toi, chaque fois que je l'ai lu, j'ai eu la nausée.
Fahrenheit 451 reste quand même un bon bouquin...
A.C.
Je ne l'ai pas trouvé si extraordinaire que ça (sauf pour les idées bien sûr), mais j'ai l'impression que Bradbury est bien meilleur sur les nouvelles. Le film est plutôt pas mal dans mon souvenir (enfin ne t'attends pas non plus un blockbuster :D)
RépondreSupprimerDe la part de Truffaut, je ne m'attends à rien (pour rester poli). Faut juste que je trouve le courage... un jour.
SupprimerJ'avais plutôt bien aimé "De la poussière à la chair...", que j'avais chroniqué pour le Bifrost consacré à Bradbury.
A.C.
Je suis d'accord avec l'auteur. Même si j'adore Bradbury (The Silver Locusts a été le premier bouquin en anglais que j'ai lu, d'une grande poésie ! En français : Les Chroniques Martiennes), je n'ai pas aimé ce Farenheit 451 que je considère comme passablement mauvais. Quant à l'adaptation de Truffaut, au secours ! (Comme d'ailleurs tous ses films). Je n'aime pas Truffaut du tout et il a ici contribué à enfoncer un peu plus le roman.
RépondreSupprimerBon, là, clairement, ça ne donne pas envie de voir le film. Mais ça ne m'étonne pas de Truffaut, que je trouve surfait. La seule fois que je l'ai trouvé bon, c'était dans "Rencontre du troisième type", où il jouait le rôle du scientifique... Excellent !
SupprimerA.C.
On n'est pas d'accord ! Il joue comme une clenche et si tu regardes bien, à un moment il répond même avant que la question ne soit posée ! Plus nul tu meurs !
RépondreSupprimerAh non, ça m'avait échappé. Tu vois, je le trouve tellement mauvais réalisateur que quand il joue, pour moi il est bon. Tout est relatif, Robert avait raison !
SupprimerA.C.
Hé hé ! il est nul dans les deux cas ! :-D
RépondreSupprimerNon, moins nul dans un cas que dans l'autre...
SupprimerA.C.
Un grand classique que j'ai relu il y a quelques temps déjà. J'ai encore plus aimé en relecture. Le film a vieilli par contre. Alors que le roman nous laisse suffisamment de champs libres que pour adapter notre imaginaire aux images plus actuelles.
RépondreSupprimerça ne donne pas trop envie de voir le film... ;-)
SupprimerA.C.